La bronchiolite du nourrisson : mise en cause d’une nouvelle population de lymphocytes
Pourquoi les bébés sont particulièrement sujets à la bronchiolite ? Peut-être à cause de lymphocytes particuliers, détectés uniquement chez eux. C’est en tout cas ce que suggère ce papier à la une !
Découverte d’une population de cellules propre aux nourrissons
Les nouveau-nés sont fragiles, leur système immunitaire n’est pas totalement paré contre toutes les infections. L’allaitement est une façon de leur donner un petit coup de pouce (grâce aux anticorps protecteurs contenus dans le lait). A propos de leur système immunitaire, des chercheurs français et chinois viennent de découvrir une population de lymphocytes présente uniquement chez les nouveaux nés. C’est justement la présence de ces lymphocytes qui les rendrait plus sensibles à l’infection par le virus respiratoire syncytial (appelé VRS). Ce virus est responsable de troubles respiratoires parfois graves comme la bronchiolite.
Réguler, pour le meilleur mais aussi pour le pire
Souvenez-vous, les chercheurs identifient des populations de cellules en utilisant la technique de cytométrie en flux (ici, il s’agit plus exactement de cytométrie de masse). Juste pour le plaisir, voici le phénotype de la population de lymphocyte qu’ils ont détecté chez les nourrissons : CD5hi CD10– CD1clo CD21int CD45RAint CD23hi CD24lo CD38lo IgDlo IgMlo(1). Rien que ça ! Un peu plus simplement, il s’agit de lymphocytes B régulateurs néonatals appelés nBreg (neonatal regulatory B cells). Comme leur nom l’indique, ils régulent. Ces cellules sont utiles pour limiter une inflammation et donc empêcher le système immunitaire de s’emballer. Cependant, leur présence chez les nouveau-nés peut poser problème lors d’une infection par le VRS car ce dernier va utiliser les nBreg à son avantage, pour se propager tranquillement… et causer des dégâts !
Découverte d’un mécanisme vicieux
Dania Zhivaki et ses collègues, en plus d’identifier cette nouvelle population de nBreg, livrent au grand jour un mécanisme très vicieux. Les nBreg reconnaissent le VRS et, sous son influence, se mettent à exprimer le récepteur CX3CR1 : la porte d’entrée du virus(2) ! Il peut donc entrer sans aucune difficulté. En plus de cela, une fois à l’intérieur, le VRS agit sur le génome des cellules. Il va inciter les nBreg à produire une molécule régulatrice (l’interleukine 10). C’est gagné pour le VRS : il peut entrer à son aise dans les cellules grâce aux récepteurs CX3CR1 et l’interleukine 10 permet d’inhiber l’activité des autres cellules du système immunitaire. Il se propage et personne ne l’arrête !
Nouvelle population = nouvelle cible
Grâce à cette découverte, les chercheurs ont peut-être trouvé un tendon d’Achille au VRS. Les nBreg pourraient être de nouvelles cibles dans des stratégies thérapeutiques. D’autre part, plus cette population est présente, plus les nourrissons semblent être prédisposés à développer des bronchiolites liées à l’infection par le VRS. Nous pouvons donc imaginer pouvoir prévoir cette affection grave des voies respiratoires et ainsi l’éviter !
(1) les sigles en indices (lo, hi, int ou -) informent sur l’état d’expression du marqueur. lo : low (faible) ; hi : high (forte) ; int : intermédiaire ; – : non exprimé.
(2) Plus généralement, CX3CR1 est exprimé par de nombreux lymphocytes. Il s’agit du récepteur d’une molécule appelée fractalkine, impliquée dans l’adhésion et la migration cellulaire. Ici, le virus est capable de se fixer à CX3CR1 pour pénétrer dans la cellule.