Qu’est ce qu’un anticorps ?

Vous avez probablement croisé plus d’une fois le mot « anticorps » sur Chercheur&Co. L’anticorps peut parfois être déroutant car on le retrouve aussi bien en tant que molécule de défense fabriquée par notre système immunitaire qu’en tant qu’outil de détection dans des expériences… Mais alors, qui est-il vraiment ? Quelques explications sur cet agent double.

Avant tout, une protéine

Les anticorps sont des immunoglobulines, une grande famille de protéines riches en sucres. Ils sont souvent représentés schématiquement en forme de Y, proche de leur conformation(1) réelle. Il y a deux parties dans un anticorps, associées à des fonctions différentes.

Quelques mots sur ces fonctions peut-être… Les anticorps ont pour rôle de défendre l’organisme et ils ne le font pas au hasard. Ils sont en effet capables de reconnaître un antigène, c’est-à-dire une petite partie d’un composé considéré comme étranger par l’organisme. Une fois l’antigène reconnu, l’anticorps peut initier son élimination par différents mécanismes effecteurs : activation d’une cascade d’enzymes (le complément), recrutement d’autres cellules du système immunitaire ou encore par neutralisation(2).

Nous pouvons maintenant nous pencher sur la structure de l’anticorps. Pour cela, rien de mieux qu’un schéma, le fameux Y :

La structure d'un anticorps

Les anticorps sont constitués de deux chaînes légères et de deux chaînes lourdes. La partie variable (propre à un anticorps donné) permet de reconnaître l’antigène. La partie constante (propre à une classe d’anticorps) est responsable des fonctions effectrices.
Les lymphocytes B, fabriques à anticorps

Les anticorps sont souvent considérés comme des molécules libres et solitaires. Ils sont en fait produits par une cellule du système immunitaire : le lymphocyte B. Ce dernier peut d’ailleurs garder quelques exemplaires d’anticorps accrochés à sa surface et s’en servir comme récepteur (appelé BCR pour B cell receptor).

Rappelez-vous qu’un anticorps ne reconnait qu’un seul et unique antigène, comment est-ce alors possible d’avoir suffisamment de diversité pour couvrir tous les antigènes potentiels ? L’explication se trouve dans le noyau du lymphocyte B, au niveau des gènes. Le lymphocyte B peut fabriquer des anticorps à partir d’une collection de morceaux de gènes. Leur assemblage aléatoire permet de créer un exemplaire quasi unique d’anticorps. En plus de cela, une enzyme présente dans le noyau peut venir ajouter des mutations au plan de fabrication de l’anticorps.
C’est un peu comme si vous aviez à votre disposition une boîte remplie de LEGO, de couleurs et de formes différentes. Imaginez déjà la multitude de constructions différentes que vous pouvez faire. Si en plus, vous avez la possibilité de personnaliser votre création en ajoutant des autocollants sur certaines briques, les possibilités sont encore multipliées !

Eh bien, dans cette situation vous êtes le lymphocyte B et votre construction est l’anticorps que vous allez laisser s’échapper pour sauver le monde (en l’occurrence combattre un pathogène !).

Tous ces événements concernent la partie variable de l’anticorps, celle responsable de la reconnaissance de l’antigène. La partie constante, quant à elle, permet de classer les anticorps dans différents groupes aux fonctions effectrices distinctes.

Les classes d’anticorps

Le chercheur parle souvent d’IgG, d’IgA, d’IgM… Cela fait référence aux différentes classes d’anticorps. « Ig » est le diminutif de « Immunoglobuline » (l’autre nom des anticorps). La lettre qui suit indique le fragment qui constitue la partie constante de l’anticorps.

Reprenons l’exemple des LEGO. Les briques et les autocollants ne forment qu’une partie de la construction, vous avez maintenant la possibilité d’ajouter un élément final. Mais attention le choix est limité et ne dois pas être fait à la légère : allez-vous préférer un élément lumineux pour égayer votre construction ou un élément motorisé pour la faire avancer ? Des fonctions bien différentes…

Le lymphocyte B doit pour sa part choisir entre les fragments G, M, D, A et E, qui ont chacun leurs avantages dans une réponse immunitaire ! Ainsi, les IgM sont généralement détectées au tout début d’une réponse immunitaire et forment une première barrière de défense ; les IgE interviennent plutôt lors des réactions allergiques ; et les IgA sont particulièrement efficaces pour la neutralisation au niveau des muqueuses.

L’anticorps comme outil

Les propriétés des anticorps sont utilisées dans de nombreuses techniques : cytométrie en flux, ELISA, ELISpot pour n’en citer que quelques-unes. En effet, les anticorps sont de formidables outils de détection et il est possible d’accrocher tout et n’importe quoi à leur partie constante. Ainsi, les chercheurs ont aujourd’hui accès à des anticorps spécifiques d’absolument tout ce qu’ils veulent ! Ces anticorps sont la plupart du temps produits chez la souris, le lapin ou encore la chèvre. La technique la plus classique consiste à immuniser l’animal avec l’antigène souhaité et de récupérer les anticorps dans leur sérum.

Enfin, n’oublions pas que les anticorps peuvent également être des outils thérapeutiques pour l’Homme, on parle de biothérapie. Dans le cas de maladies auto-immunes par exemple, des anticorps ciblant des molécules inflammatoires peuvent être injectés au patient pour calmer son système immunitaire. Dans ce cas, les anticorps sont complètement ou partiellement humanisés de façon à être tolérés par l’organisme.

(1) Structure due à la disposition tridimensionnelle des atomes qui constituent la protéine.
(2) Dans le cas d’un virus par exemple, la neutralisation par un anticorps l’empêche de pénétrer dans se cellule cible.

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