L’ELISA
Si je vous dis ELISA. Vous me répondez …
Un prénom !
Une chanson !
Perdu ! En langage de chercheur cela signifie Enzyme Linked ImmunoSorbent Assay(1). Moins glamour – j’en conviens – c’est pourtant le quotidien de nombreux chercheurs. Imaginez, ils en font même des sandwiches !
Une technique simple et rapide
L’ELISA permet de détecter et quantifier un élément biologique dans un échantillon. On peut détecter toutes sortes de choses : des protéines virales ou bactériennes, des anticorps, des allergènes… Cette technique est basée sur une réaction enzymatique permettant de quantifier un composé coloré à la fin de la manip’.
Prenons l’exemple d’un chercheur voulant utiliser une solution contenant des protéines X. Il doit l’utiliser à une concentration très précise pour faire pousser ses cellules. Pas assez, ses cellules risquent de mourir et trop, elles risquent d’être intoxiquées. Problème : l’étiquette sur le tube s’est décollée (classique !), sa solution est de concentration inconnue. Comment faire pour la retrouver (avec un peu de chance notre chercheur l’a utilisée la veille et à noter sur son cahier de manip’ la concentration ?!) malheureusement non.
Une solution – vous l’aurez deviné – l’ELISA !
La version « sandwich »
Cette version de l’ELISA consiste à détecter le composé recherché en le prenant en sandwich entre deux anticorps : un anticorps de fixation et un anticorps de détection. Voyez plutôt :
C’est exactement ce qu’il faut à notre chercheur. Il n’y a plus qu’à !
Une technique colorimétrique
Le premier anticorps (l’anticorps de fixation) est accroché au fond d’une plaque constituée de 96 puits (donc 96 tests possibles en même temps !). Le chercheur ajoute ensuite un volume précis de sa solution à tester puis l’anticorps de détection.
Rappelons que l’ELISA est une technique basée sur une réaction enzymatique. L’anticorps de détection est en fait couplé à une enzyme. La dernière étape de la manip’ consiste à ajouter le substrat de cette enzyme qui va être dégradé en composés colorés.
Ainsi, plus il y a de protéines X, plus il y aura d’anticorps de détection accrochés dessus, donc plus d’enzymes, donc plus de substrat dégradé, donc plus de couleur ! En gros, la concentration de notre protéine X est proportionnelle à la concentration de la couleur ! Notre chercheur n’a plus qu’à lire sa plaque dans la machine(2) spécialement prévue à cet effet.
La gamme étalon, nécessaire à l’interprétation
Vient ensuite le moment de l’analyse. Comme notre chercheur est méticuleux il a bien pensé à préparer une gamme étalon, c’est à dire des puits à des concentrations connues qui permettent de faire le lien entre la concentration de protéine X et l’intensité de la couleur dans le puit. Par exemple, il aura établi qu’un absorbance de 0.6 correspond à une concentration de 2mg/mL de protéine X.
Ouf sauvé ! Notre chercheur va pouvoir nourrir ses cellules avec la bonne dose de protéine X … Ou pas … dans la précipitation il a laissé sa flasque de culture cellulaire sur la paillasse toute la journée. Les cellules préfèrent être bien au chaud à l’incubateur 😕 Il ne reste donc plus grand monde à nourrir…
Tant pis il recommencera sa manip’ demain 😉
Un outil parfait pour le diagnostic
L’ELISA permet aussi de détecter et quantifier des anticorps spécifiques d’un antigène.
Prenons un exemple simple. Votre docteur vous dit :
Ah ! Je pense que nous allons vous faire une sérologie pour le virus Mimitouplux ! Il va donc falloir faire une petite prise de sang.
Votre docteur entend par là : nous allons rechercher dans votre sang des anticorps spécifiques du virus Mimitouplux pour savoir si vous êtes effectivement infectés par ce virus.
Dans ce cas il s’agit de la technique d’ELISA indirect et non plus de la version sandwich. Un morceau du virus Mimitouplux est accroché au fond de la plaque. Le sang du patient est ajouté : s’il contient des anticorps dirigés contre le virus, ils vont s’y fixer puis être détectés par l’anticorps de détection. Exactement sur le même principe que l’ELISA sandwich (enzyme, substrat etc.) sauf que l’anticorps de détection n’a pas la même spécificité.
Rassurez-vous, le virus Mimitouplux est responsable de la bonne humeur donc rien de grave si vous y êtes exposés, au contraire !
Vous avez dit séropositif ?
Plus sérieusement, l’ELISA est habituellement utilisé pour détecter la présence d’anticorps anti-VIH (virus responsable du Sida) dans le sang. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’on parle de séropositivité en référence à la détection de ces anticorps chez les personnes infectées par le VIH. Cette expression « être séropositif » est entrée dans le langage courant lorsqu’on parle du Sida. Pourtant, nous pouvons tout aussi bien être séropositifs pour le virus de la grippe ou encore de la varicelle.
Voilà, nous avons fait le tour de l’ELISA ! Mais sachez que les chercheurs ne sont jamais à court d’inspiration et aiment apporter de la fantaisie à leurs manip’. Certains ont dut trouver les couleurs du traditionnel ELISA un peu fades et ont inventé une version fluorescente. Ils ont appelé leur progéniture ELFIA !
(1) Dosage d’immunoabsorption par enzyme liée.
(2) Le lecteur est capable de déterminer une absorbance. La valeur doit être comprise entre 0 et 1. Plus la couleur est foncée (forte concentration de la protéine), plus la valeur d’absorbance est proche de 1.