Microbiote : Quand les bactéries s’invitent dans votre intestin

Il s’en passe des choses dans notre intestin. Cela passe plutôt inaperçu pourtant les bactéries présentent dans notre gros intestin représentent pas moins de 2kg de notre poids total ! C’est ce qu’on appelle le microbiote intestinal, un sujet fascinant qui plait beaucoup aux chercheurs…

Des bactéries dans mon intestin ?!?!

Rassurez-vous rien de plus normal. En effet ces bactéries ne sont pas nocives, bien au contraire elles sont indispensables au bon fonctionnement de notre intestin mais – bien plus surprenant – elles pourraient aussi influencer notre cerveau. De toute façon, il serait bien complique d’essayer de s’en débarrasser car elles sont tout de même une petite dizaine de milliers de milliards. Une sacrée fête dans notre intestin ! Et puis, mesdames, dites-vous que c’est toujours 2kg que l’on peut retirer à la balance sans scrupule en se disant « ce n’est pas à moi, c’est à mon microbiote intestinal ». D’ailleurs, il n’y a pas que dans l’intestin que l’on retrouve un microbiote, c’est aussi le cas dans la bouche et au niveau des organes génitaux.

Bébé arrive, les bactéries aussi

Les cartons d’invitation pour la grande fête qui se prépare dans notre intestin sont envoyés dès la naissance, et les bactéries ne se font pas attendre : en quelques mois, notre microbiote est déjà bien formé et il continuera d’évoluer toute notre vie. Mais d’où viennent ces bactéries me direz-vous ? Deux solutions : du microbiote vaginal de la mère lors d’un accouchement par voie basse et/ou de l’environnement ambiant lors d’une césarienne. Une étude récente(1) met d’ailleurs en avant la présence d’une plus grande diversité de bactéries dans l’intestin d’un bébé né par voie basse.

Ensuite de nombreux facteurs vont influencer notre micobiote. Par exemple, au vu de sa localisation, le microbiote intestinal est forcément très sensible aux types d’aliments que nous consommons. Le mois dernier des chercheurs ont publié leurs travaux(2) sur l’impact de la consommation de protéines de bœuf, de poulet ou de soja par des rats sur la composition de leur microbiote. La composition s’est en effet révélée différente, reste à voir l’impact que cela peut avoir sur leur santé.

La liste des invités

Mais comment font les chercheurs pour déterminer la composition de notre microbiote. Eh bien ils doivent mettre les mains dans le cambouis (pour rester polis). La liste des invités s’établi à la sortie de la fête c’est à dire… dans les selles ! Elles sont le reflet de la diversité des bactéries présentent dans notre intestin. Mais attention, cela ne signifie pas qu’en sortant elles disparaissent de notre microbiote. Une bactérie se multiplie continuellement, elles ont donc laissé tout un tas de copines parfaitement identiques à elles-mêmes à l’intérieur.

Entre 2008 et 2011, un grand projet financé majoritairement par l’Union Européenne a permis d’établir une composition très complète du microbiome intestinal humain. Tout cela grâce à des techniques de séquençages à haut débit. 3.3 millions de gènes différents ont ainsi été identifiés dans notre microbiote ! Les chercheurs ont aussi ce petit côté festif puisque cette étude portait le nom de MétaHIT… le tube de l’été des bactéries ? 😉

Microbiote et pathologies

C’est ici que l’étude du microbiote prend toute son ampleur et fascine la communauté scientifique. En effet, ces dernières années, une meilleure compréhension du microbiote, sa composition et son fonctionnement, a permis de révéler qu’une perturbation de cette communauté pouvait avoir de sérieux impacts et serait même liée au développement de certaines maladies. On retrouve – en tête – des maladies se caractérisant par une inflammation des voies digestives comme que la maladie de Crohn. Mais aussi des maladies en lien avec le métabolisme comme le diabète et l’obésité.

La plupart du temps, ce genre de pathologie survient lorsque des bactéries manquent à la fête. Alors que faire dans ces cas-là ? Eh bien rappelez-vous où il est possible de trouver ces bactéries ailleurs que dans les intestins… dans les selles ! C’est exactement ce que se sont dits nos chercheurs et en ni une ni deux ils ont eu une idée de génie : puisqu’il est possible de transplanter des cœurs, des reins, des poumons… alors pourquoi pas des selles. Certains traitements(3)consistent donc à transplanter des selles de « bonne » composition à des personnes souffrant d’un manque de certaines bactéries dans leur microbiote.

Dans d’autres situations, le dérèglement du microbiote n’est pas dû à une bactérie absente mais plutôt à un trouble-fête. Autrement dit, une bactérie surreprésentée qui devient nocive. Ce type de déséquilibre serait en lien avec l’apparition de certains cancers comme celui du côlon.

Le cerveau s’invite à la fête

Imaginez que toutes ces bactéries puissent communiquer avec notre cerveau. Les chercheurs savaient déjà que notre intestin était relié à notre cerveau grâce à un large réseau nerveux. Cela voudrait dire que les bactéries de notre microbiote sont capables d’actionner ces boutons et donc de dialoguer avec notre cerveau. Vous imaginez déjà nos fêtards intestinaux en train d’appuyer sur l’interphone :

Hé Ho le cerveau, tu peux monter un peu le son dans l’intestin ?

Plus sérieusement, des chercheurs de l’INRA ont par exemple montré que des  rats dépourvus de microbiote intestinal étaient plus stressés. Preuve que notre microbiote influence bien notre comportement.

 

Notre microbiote est plein de ressources. Pouvant être considéré comme un individu a part entière qui loge dans notre intestin (2kg quand même !), nous réussissons à l’apprivoiser petit à petit. Longtemps sous-estimé, son influence sur de nombreux processus physiologiques pousse aujourd’hui les chercheurs à tenir compte de ce paramètre crucial dans leur études. Vous n’avez surement pas fini d’entendre parler du microbiote !

 

(1) Rutayisire E. et al., BMC Gastroenterology 2016.
(2) Zhu Y. et al., Front Microbiol 2017.
(3) Khoruts A. et Weingarden AR, Immunology letters 2017.

Pour aller plus loin : Dossier INSERM

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